Burotop du stylo au BTP

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A l’origine Burotop, était une entreprise de vente de matériel de bureau. Aujourd’hui, le groupe est composé de sociétés d’informatique, d’électricité, de BTP et d’immobilier. De quoi s’y perdre. « Brazzamag » a fait le tour du propriétaire avec son président et fondateur, Hassan Attie. 

« Tu jettes un Libanais à l’eau, il ressort avec un poisson entre les dents. » C’est par ce proverbe que Mohamed Attyé décrit le parcours de son oncle, Hassan Attie. Un homme d’affaire qui se lance au début des années 2000. Ils ne sont pas nombreux à ouvrir des commerces à Brazzaville à cette époque. Mais lui voit le potentiel du pays. Il commence par la vente de matériel de bureau dans un local étroit. Burotop est né.

Dix-sept ans plus tard, le local des débuts est devenu un magasin aux larges allées, les présentoirs sont remplis d’imprimantes, d’ordinateurs, de portables.  Dans une extension sont exposées les différentes gammes de bureaux. Comme un clin d’œil aux origines, la boutique vend encore des ciseaux, stylos et cahiers. Voilà pour la partie émergée de l’iceberg, car la société a acquis également un entrepôt de 5 000 m², sans oublier les bureaux de Pointe-Noire et Kinshasa. Surtout, le groupe s’est diversifié dans quatre autres activités.

Synergie et diversification

Que s’est-il passé entre-temps ? Une histoire qui se résume en un mot : la synergie. Derrière ce jargon d’affaire se cache la philosophie qui a permis l’expansion de Burotop. Pour l’expliquer, Hassan prend la posture d’un professeur. Debout dans son immense bureau, cigare à la main, il enchaîne les grands gestes pendant près d’une demi-heure. « Allons-y par étape », lance-t-il

Burotop prend le virage de l’informatique en 2005. L’idée de départ est de compléter la vente de matériel de bureau par des ordinateurs. Mais la petite équipe entend parler d’un marché plus grand : la Banque mondiale pilote un plan pour équiper les administrations en fibre optique. C’est le premier projet de ce type dans le pays. L’entreprise fait venir des ingénieurs. Il faut alors apprendre à maîtriser l’équipement en système informatique. La nouvelle entité, Burotop Iris, décroche le contrat auprès de Washington.

Hassan Attie trouve à ce moment le modèle économique qu’il va sans cesse reproduire. Il s’agit de créer une activité pour mieux servir la précédente. L’installation de systèmes informatiques exige souvent le développement de systèmes et de réseaux électriques. Là encore, au lieu de sous-traiter, l’homme d’affaires crée une nouvelle société, Celec. Pour installer les réseaux électriques, quelques travaux en BTP sont nécessaires. Pas de soucis :  en 2011, il acquiert MBTP. La petite entité d’une quinzaine d’employés emploie aujourd’hui 700 personnes. C’est la principale activité du groupe : elle réalise des travaux publics comme les villas pour particuliers.

Enfin, rien de mieux qu’une société immobilière, pour vendre ou louer les immeubles que MBTP construit. Immo Invest est le dernier-né. Si vous désirez un appartement, il aura été construit, électrifié, équipé en informatique, meublé par le groupe Burotop et ses sociétés sœurs. Même le stylo et le papier utilisés pour signer le contrat proviendront probablement d’un de leur magasin.

Un état d’esprit libanais

Pourquoi se diversifier autant ? « Pour approfondir le royaume de Dieu », lâche Hassan, sérieux. Un ange passe. L’homme d’affaires croise le regard de son neveu, ne tient plus et explose de rire, fier de son effet. « Tu aurais vu ta tête ! » Plus sérieusement, il explique sa stratégie : « Le pays à 4 millions d’habitants, on arrive vite à une taille critique, analyse-t-il. La diversification permet d’ouvrir de nouveaux marchés. » De plus, la synergie a l’avantage de réduire le nombre d’intermédiaires, donc de baisser les coûts et maîtriser la qualité des prestations.

Ce pragmatisme est inscrit dans la légende de la famille, comme le raconte Hassan. « A l’origine, les Libanais devaient se rendre en Amérique du Sud, où la diaspora est importante. Mais il y a eu un souci à l’escale de Marseille, et ils se sont retrouvés au Sénégal, sans connaître la langue, sans soutien, sans rien… Ils ont rebondi : ils ont commencé par le commerce d’arachide, puis de tissu, et ont gravi les échelons de cette manière. » Les Attie se considèrent comme les descendants de ces Libanais : la mère de Hassan est née au Sénégal, tout comme lui.

Un état d’esprit libanais, mais pas fermé sur lui-même. Certes, les principaux actionnaires ont des liens de parenté avec Hassan. Mohammed, son neveu, gère aujourd’hui l’activité initiale, Burotop. Mais il ne veut pas réduire sa société à son nom. « D’autres salariés travaillent chez nous depuis plus de dix ans. Ils se sont fait une place ici, et sont Congolais, Indiens, Togolais… Ils ne s’appellent pas Attie, mais eux aussi sont de la famille. »

Et pour la suite, il laisse entendre qu’il pense à un nouveau secteur d’activité. « Je ne vous dirai pas lequel, c’est trop tôt. » Il ne reste donc qu’à attendre, mais on ne doute pas qu’il saura encore surprendre.

Par Antoine Rolland

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